Coup de Coeur Francophone | Samuele + Julie Aubé
Le
récipiendaire du Festival International
de la Chanson de Granby de 2016 débarque sur scène arborant un chapeau à la
manière de Jean Leloup ou d’Antoine Corriveau avec l’air déterminé
à vouloir mettre le feu aux planches. L’artiste est vite rejoint par ses six
musiciens portant costumes à brillants, comprenant une section de cuivres dans
lequel figure son fils à la clarinette, pour présenter du nouveau matériel. Audacieux
choix de casser de nouvelles compositions pour le Coup de Cœur Francophone!
D’entrée de jeu, le public semble autant composé de quinquagénaires que d’un auditoire dans la jeune vingtaine. Les chemises aux motifs à carreaux abondent pour faire écho à la simplicité que dégage l’univers de l’artiste. Pour ajouter à l’expérience et être d’autant plus inclusive, principe au cœur des préoccupations de l’artiste originaire du quartier Hochelaga; une interprétation des paroles de chansons en langage des signes. Une magnifique initiative retrouvée tout au long du spectacle.
La Sala Rossa, salle affublée d’une électricité
défaillante depuis toujours, cause un fuzz énorme dans les haut-parleurs, chose que
l’équipement récemment acquis ne peut palier au modelage de l’acoustique qui doit être revu et corrigé. Sans même sourciller sur la sono discutable, signature
du modeste lieu de diffusion, elle se moque gentiment des fantômes de l’endroit
en guise d’entrée en la matière, sans affecter l’éloquence de ses interventions
qui ponctuent habilement ce nouveau spectacle. Preuve de plus qu’elle a une
aisance peu commune devant public et une maîtrise d’elle-même qui font
certainement l’envie de bons nombres d’artistes. Sans être tout à fait rodé, on
note davantage de dynamisme au niveau de la mise en scène de cette nouvelle
mouture, où le plaisir partagé avec ses musiciens se répercute sur le degré d’enthousiasme
du public.
Samuele est reconnue pour ses prises
de positions, elle fait une allocution sur la reprise du pouvoir populaire est
nécessaire, surtout maintenant qu’un nouveau parti vient d’être prendre les rênes
de la marie de Montréal. Elle fait aussi allusion au mouvement #metoo avec un
discours sur le consentement, l’enthousiasme et les choix éclairés. Elle n’en
est pas à ses premières armes au niveau du ton dénonciateur, comme elle le
relate avec son expérience aux Francouvertes en 2013 et son point de vue sur
les événements autour du Printemps
Érable, où on lui dit que ce n’est pas l’endroit pour parler de ce sujet, ce qui lui a probablement coûté la finale. Qu’importe, comme elle le dit
si bien; elle est encore là avec ses propos plus virulents que jamais, mais
elle s’interroge à savoir que si la scène n’est pas une tribune adéquate pour
s’exprimer, alors où est le bon endroit pour le faire?
Une bouffée d’air frais de l’Acadie en première partie
En
guise d’apéritif, l’acadienne Julie Aubé;
la plus réservée membre de la formation Les
Hay Babies, propose un tout premier spectacle solo.
Entourée
par ses trois musiciens, elle déballe un folk atmosphérique infusé de blues
avec son accent typique du Nouveau-Brunswick. Ironiquement, l’assistance entend
bien peu les paroles avec la sonorisation qui semble s’ajuster tant bien que
mal en cours de route. Ce spectacle bénéficie aussi de la traduction simultanée
en langage des signes que l’on aimerait bien tous comprendre pour l’occasion!
Aubé essaie d’incarner les pièces
issues de son tout nouvel album Joie de vivre, rempli de textes empreints
d’histoires d’amour douces-amères. Les trop nombreux et laborieux changements
de guitares empêchent en peu l’auditoire d’entrer de plein pied dans l’univers
singulier de l’artiste. « Ça m’apprendra d’acheter une guitare à l’Armée
du Salut! » nous dira celle qui a vécu une profonde crise d’angoisse la
veille de sa représentation.
Visiblement,
la chimie reste encore à s’établir entre ses musiciens chevronnés et elle,
malgré qu’ils tirent admirablement bien leurs épingles du jeu, pour des
chansons apprises l’avant-veille du spectacle. Les structures musicales
parsemées d’envolées instrumentales, permettent d’oublier qui lui manque un peu
d’aisance sur les planches, c’est dans ces moments plus fougueux où elle semble
le plus assumée.
En
somme, un bon premier spectacle, considérant qu’il lui est bien difficile de
faire mieux, étant en terrain étranger pour cette première excursion sans ses
comparses habituelles qui prennent beaucoup plus de place
qu’elle. Gageons qu'elle sera bientôt plus à l'aise dans son rôle à l'avant-plan!
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