Woodkid n'est quand-même pas Diana Krall
À l’occasion de l’ouverture de la 35e édition du
Festival International de Jazz de Montréal, par une chaude soirée des derniers moments
du mois de juin, rien de mieux qu’un événement extérieur à grand déploiement.
De retour pour une deuxième année
consécutive, Woodkid revient devant
un public déjà conquis, mais cette fois, ce n’est pas le Métropolis qu’il
remplit à pleine capacité, mais la Place des Festivals qu’il vient faire
vibrer. Choix audacieux, s’il en est un, de la part des programmateurs de cet
événement réputé. Les attentes les plus folles sont permises pour son volet
visuel que l’on espère plus immersif et grandiose que jamais, vu l’heure du
début de la représentation, tout juste après l’arrivée de la noirceur. Un bain
de foule est évidemment à prévoir pour le spectacle de ce créateur de
structures sonores et de vidéos magistrales. La fébrilité est dans l’air pour
ce que l’on souhaite être une soirée mémorable avec une météo idéale!
Après les présentations protocolaires,
l’immense auditoire hétéroclite est fin prêt à en recevoir plein le gueule de
la part de l’artiste français. Le public lui réserve un très chaleureux accueil
lors de son apparition sur scène, du haut des escaliers spécialement emménagé,
on sent le bonhomme émotif dès les premières notes qu’il pousse. Visiblement
ému de nous voir réunis en si grand nombre, son intervention introductive est
empreinte de sincérité et de gratitude, de sorte que l‘amour envers les
spectateurs montréalais l’habite et on lui rend bien. Sur scène, on aperçoit
une section de cordes et une autre de cuivres qui se joignent aux trois postes
de percussions ainsi qu’à son pianiste, de sorte qu’il est bien entouré pour
livrer une performance étoffée.
Au fur et à mesure que le
spectacle fait son chemin, il se fait une sorte d’épuration naturelle des
festivaliers qui n’ont tout simplement aucune idée de ce qui les attends. Comme ces
amateurs de Diana Krall, qui n’ont
su que faire de cette immersion de sentiments d’une rare intensité, en
admettant que les émotions véhiculées ne sont pas toutes faciles à prendre,
avec des structures aussi viscérales. Dommage, puisqu’ils ont manqué une expérience
peu commune avec une progression lente d’un univers introspectif, parfois même
mélancolique, à un autre beaucoup plus festif et énergique. Justement, des
êtres sensibles et qui sont un tant soit peu réceptifs à ce genre de pauses
réflectives, comme une sorte de thérapie de groupe si l’on veut, devraient être
en mesure de comprendre malgré que ce type de musique ne soit pas toujours à la
portée de tout le monde…
Ceux qui restent (la grande
majorité) sont carrément ensorcelés par ses compositions aux arrangements qui
ont une certaine affinité avec le jazz. De plus, on peut déceler qu’il prend
bien souvent des airs de crooner nouveau genre avec son débit et l’intonation
de son chant. Une lucidité poignante est palpable à travers les textes de ce charismatique
personnage et ce, tout au long de sa prestation. Un des meilleurs exemples en
la matière, la pièce titre de son album The
Golden Age, qui évoque la fin de l’âge d’or de nos civilisations
occidentales, d’une époque révolue, dans laquelle la génération montante (son
public cible) se trouve d’ores et déjà aux premières loges.
Un seul bémol, l’éclairage manque
un peu trop fréquemment ses punchs et on aurait pu prendre l’UQAM en mapping, ce qui aurait pu aller de pair
avec son univers visuel créatif, au lieu d’une rotation de projections
générique d’images du festival en arrière-plan. Peu importe, puisque l’on se
retrouve bien souvent les yeux fermés, foudroyés d’intensité! Même les
spectateurs les plus récalcitrants n’ont plus d’autre option que de se laisser
envoûter par le sympathique cousin parisien. Avec raison, puisque ses productions
sont livrées d’une manière si exaltantes qu’elles ne peuvent faire autrement
que de raisonner profondément chez l’auditeur. Chapeau à l’artiste, ses
musiciens et la direction du festival, tout simplement magistral!
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